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21/07/2012

Douce France

Quand je vous dis que Mère Nature n’arrête pas de me prendre par la main pour me faire rencontrer des gens, des textes, des idées… vous ne me croyez pas, Eh bien, j’en ai encore eu la preuve aujourd’hui ! Il faut que je vous raconte tout !

Figurez-vous que j’ai été invité à un « repas champêtre républicain ». Je n’ai toujours pas compris ce que voulait dire ce qualificatif. Après tout, Sarko est républicain, il n’est pas royaliste que je sache ! Bref, il s’agit en fait d’une invitation très large organisée par le Front de Gauche.

Tables dressées sur une superbe pelouse. Accueil cordial autour d’apéritifs aussi divers que variés. Il y a tout sauf ce que j’aimerais. L’hôtesse me voit fouiller la table du regard, désespérément…

 - Qu’est ce que je te sers, Pierre ? 

- Un communard.

- Qu’est-ce que c’est ?

- Un kir avec du rouge.

Je constate qu’elle ne lit pas mon blog puisqu’elle ignore mon penchant pour le rouge. Mais elle est vite pardonnée quand je la vois aller spécialement à la maison pour me rapporter un verre de rouge. Ça c’est l’hospitalité française !

-          Viens, je vais te présenter une écrivaine.

Jolie femme, belle couverture de son dernier roman. Edition à compte d’auteur.

-          Je n’en vis pas, mais je fais mes frais.

Bravo. Ça m’intéresse ! Roman policier sur un fond d’anticipation et de politique fiction. J’achète. Merde, je n’ai rien sur moi !

-          Je vais chercher mon chéquier. J’en ai pour une demi-heure. SVP gardez-moi une place.

Je cravache mon diesel. Pas très écolo. Tout le monde est à table. Je la cherche du regard. Elle m’a oublié. Je trouve une place libre et m’assois, résigné à m’emmerder pendant tout le repas. En bien non, c’est l’inverse qui s’est passé. Je vous fais le tableau. À ma gauche Manuel, devant moi Bienvenu, à ma droite Emmanuel. Je suis cerné par des fils d’anarchistes ayant fuit les prisons franquistes. J’apprends qu’il y a localement une petite colonie d’émigrés espagnols venus déboiser.

Je tombe en pleine discussion politique. Manuel est de droite et ne s’en cache pas. Comment peut-on tomber aussi bas avec une telle hérédité ? Mais surtout qu’est-ce qu’il fout là ? Ah, c’est le correspondant du journal local ! Emmanuel lui, est au P.S. Je m’étonne. Sa réponse :

-     La société a changé. LA révolution n’est plus possible. Il faut changer les structures par petites touches.

-       Et tu penses que le P.S. permettra  d’imposer des réformes de rupture qui seront vraiment irréversibles ?

-          Pourquoi pas ?

À un moment il prononce le mot dialectique. Manuel bondit.

 - C’est un danger. C’est  la dialectique qui a permis au P.C. de conditionner les masses.

Je lui réponds.

-        Ce n’est pas l’outil qu’il faut condamner. Un rasoir peut aussi servir à égorger !

-          Tu peux égorger quelqu’un avec un rasoir à quatre lames ? Mais je suis d’accord avec toi.

-          Ça s’arrose !

Je lui serre la main puis lève mon verre de Merlot. Pour la vérité historique je dois préciser qu’aussitôt vidées les bouteilles étaient miraculeusement remplies. Et chacun de lever son verre dans un grand éclat de rire.

Le calme revenu Emmanuel m’interpelle discrètement.

-  Je ne suis pas d’accord avec toi. La dialectique ne peut jamais être dangereuse. La faute du stalinisme était justement l’absence de dialogue.

Et la discussion reprend de plus belle. Manuel parle fort, il s’emballe, se lève. Sa femme lève les yeux au ciel. Je suis plongé dans la France profonde avec ses passions et son impossibilité du dialogue. Eh oui, les terriens n’ont pas la chance des dzêtaens d’avoir une éducation basée sur la confrontation. Le sociologue et l’écrivain – car j’ai appris entre temps quel était leur état – gardent le sourire et toute leur sérénité. Après tout, ce n’est qu’un jeu. Je fais remarquer à Manuel qu’il va pouvoir dire dans son article que la discussion était animée, chaude mais cordiale

-          Non, je ne pourrais pas écrie ça. Ça ne passerait pas.

Auto censure, jusqu’où vas-tu te nicher ?

Je me lève pour aller acheter mon livre. L’écrivaine est  partie. Elle n’a même pas cherché à me fourguer son bouquin !

Et, sous le soleil de notre douce France, la discussion continue, à peine interrompue par la tombola. Chaque billet est gagnant.  Je vais pouvoir remplacer mes verres cassés, relire « le repos du guerrier » (édition illustrée et numérotée !) et redéguster à la maison cet excellent pâté. Je suis étonné de la qualité des lots. Les participants ont raclé leur fond de grenier, de bibliothèque. Je ne compte pas les éditions de luxe, richement illustrées. Il faut récolter de l’argent pour faire vivre le FdG et on n’a pas lésiné sur les sacrifices. Et dire qu’il y en a des qui croient que le profit est le seul moteur humain ! Je repère un superbe album sur la commune de Paris. Mais je ne suis pas tout seul, Bienvenu le feuillette. Il ne reste plus beaucoup de lots, j’ai une chance. Je vais chercher de la monnaie dans la voiture. A mon retour Bienvenu brandit victorieusement le livre convoité. Les organisateurs ont un petit sourire louche. Je soupçonne une odieuse machination, mais tout le monde est ravi, sauf moi. Alors que demande le peuple ?

Je passe une journée mémorable… jusqu’à 22 h. Dire que j’ai failli m’emmerder à côté de l’écrivaine. Vous voyez que Mère Nature m’a à la bonne !

Pierre Otchick, votre E.T. préféré qui trouve qu'il y a de bons moments dans cette chienne dez vie.

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