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11/12/2014

Le cigare, le castor, et les indulgences II

Il y a huit jours, je t'avais raconté mes pérégrinations sur les bord de la Loire et je m'étais arrêté en cours de route (pas dans ma promenade, mais dans mon récit). Chose promise, chose due. Même si l'intérêt est limité, tu vas voir qu'il n'est pas nul. Surtout que tu dois te demander avec anxiété pourquoi j'ai parlé d'indulgences dans le titre. Je dis avec anxiété parce que, en temps qu'ami, tu as du t'inquiéter pour ma santé mentale. Non, je ne disjoncte pas. Enfin pas plus que d'habitude !

Revenons à nos moutons. Les ruelles de la vielle ville m'ont conduit devant l'église de l'Immaculée Conception qui est aussi l'église de St-Vincent de Paul. Je n'ai pas cherché à comprendre. Comme il n'y avait pas d'autel pour prier Mère Nature – après tout, il y en avait bien un pour St-Antoine de Padou - je me suis comporté en touriste. Et j'en ai eu pour mon argent (j'avais trouvé une belle bougie et, dans l'intention de l'offrir à ma dulcinée, j'avais mis 2 € dans le tronc). En effet, cette église est un vrai musée. Je suis tombé en arrêt devant une plaque donnant les formules magiques pour obtenir des indulgences. Écoute, ça vaut son pesant de cacahuètes. Je ne cite que les indulgences partielles.

1. sept ans et sept quarantaines aux associés qui assistent à la bénédiction du Saint-Sacrement le vendredi de chaque semaine.

2. une année aux associés qui accompagnent le corps des défunts à la sépulture ou qui font une bonne œuvre quelconque.

3. indulgences attachées à la visite des églises [mot illisible] de Rome les jours indiqués dans le Missel Romain, à condition de visiter l’église de la confrérie (…)

Je n'ai pas tout compris, mais j'en avais pour mes deux euros ! Si j'étais croyant, j'aurais tout de suite exigé que cette stèle soit déposée dans un musée, en tant que témoignage d'une époque révolue. En fait, je me suis demandé si ce n'est pas l'église entière qui est le musée d'une religion désuète. Bon, je crois que je vais encore me faire des ennemis.

 

Continuons la promenade. Mes pas – ou Mère Nature – m'ont conduit devant la boutique d'une Conférence Saint-Vincent de Paul. J'ai été soufflé par la puissance de cette association dont le but est de « servir les pauvres ». Elle regroupe dans le monde près de 40.000 Conférences, soit près de 800.000 membres dans 120 pays. Il y a de quoi changer le monde. Mais quel est le bilan au bout de presque 3 siècles d’existence ? J'ai failli dire, nada. Ce ne serait pas gentil : ce qu'ils font est admirable. J'ai connu une chômeuse, mère célibataire, qui mangeait grâce à eux. Mais ça me fait toujours penser aux seaux dans mon grenier quand il pleuvait. Quand donc les terriens s'attaqueront-ils aux causes au lieu de s’épuiser à remplir le tonneau des Danaïdes ?

Pierre Otchick.

06/12/2014

Dieu est-il mort ? III

Ma note de mercredi dernier m'a valu deux commentaires. Je commencerai par le deuxième concernant la preuve de l'existence de Dieu. Mes connaissances en logique mathématique sont insuffisantes pour suivre la démonstration. Par exemple, que signifient les symboles 'carré', 'losange'... Je vais appeler mon ami Tournesol à la rescousse.

Ceci dit, si la démonstration est irréfutable, à mon avis elle nous offre un Dieu en temps qu'essence, pas en temps qu'existence.

Je veux bien aller plus loin, admettons quand même cette existence. Pourquoi celle-ci remettrait en cause « tous tes principes » ? L'adage « Ni Dieu, ni maître » réfute tout dieu qui serait un maître. Il ne réfute pas un dieu qui se présenterait comme un frère et laverait les pieds de ses amis. Regarde l'histoire de l'anarchisme, tu y trouveras des anarchiste tolstoïens1,2 tous croyants comme leur maître à penser qui était profondément anarchiste. Cela me fait penser aux premiers libertins (affranchis selon l’étymologie) . Ils refusaient tous l'autorité de l’Église en matière de science, de philosophie, de mœurs... mais beaucoup étaient encore croyants, affirmant que Dieu accorde la liberté de pensée aux humains. Ils rejoignaient les matérialistes antiques qui affirmaient que tout phénomène observable a une explication naturelle, sans nier l'existence des dieux. Ce sont ces courants qui ont enfanté l'anarchisme. Donc, ne révise pas ta position. Sois toi-même. Sois pleinement anarchiste. Peut-être feras tu comme moi et deviendras-tu athée. Rien ne presse... et cela ne répond à aucune nécessité.

Pierre Otchick.

 

 

2 Jean Maitron (s/d), L'anarchisme chrétien, tolstoïen et humanitaire, in L'anarchisme, ici et là, hier et aujourd'huiLe Mouvement social, n°83, avril-juin 1973, texte intégral [archive].

03/12/2014

Le cigare, le castor, et les indulgences I

Ami lecteur, Mère Nature n'est pas gentille avec moi. Ça fait une douzaine de jours qu'elle m'a empêché de venir bavarder avec toi. Je ne sais pas si ça t'a manqué... moi si.

Samedi, j'étais plongé dans la lecture du dernier Antoine Peillon. Tu sais, je t'en ai parlé, c'est “Corruption”. Il faut absolument que tu le lises. Tu peux l'ouvrir à n'importe quelle page, c'est un vrai roman policier. L'inconvénient, c'est qu'il faut avoir le moral, parce que c'est pire que tout ce que tu avais pu imaginer : notre société est en pleine régression! J'essaierai de t'en reparler.

Aujourd'hui, j'ai eu envie de prendre l'air. Le hasard – je devrais dire Mère Nature - a fait que, pour l'instant je ne suis qu'à quelques km du centre de Blois.  Je suis donc aller le découvrir. Il y avait un monde fou, beaucoup de bruit. J'ai donc fui vers le bord de la Loire. Non sans m'être offert un petit plaisir.  Ça fait 50 ans que je ne fume plus, mais de temps en temps je me paye un petit cigare. Il m'a fallu demander au buraliste de me l'allumer puisque, évidemment je n'ai jamais de briquet sur moi. Il m'a coupé le bout et est gentiment sorti avec un briquet. Curieusement, pour les briquets, il n'avait que l'embarras du choix. Je me suis donc dirigé tranquillement vers les quais et, chemin faisant, j'ai été tout étonné qu'une jolie fille me demande si j'avais du feu. Je lui ai expliqué que je ne fumais plus et que j'avais été obligé de demander au buraliste de m'allumer mon cigare. Elle m'a regardé d'un air bizarre. Je pense que si j'avais essayé de la draguer, je n'aurais eu aucun succès.

Bref, je me retrouve au bord de l'eau à regarder des canards. La veille, sur l'autre rive, j'avais vu un cygne qui refusait de se laisser photographier en entier : il fouinait dans la vase et ne s'arrêtait, à chaque fois, qu'une fraction de seconde pour reprendre son souffle. Un peu plus tard, c'est moi qui ai eu le souffle coupé : un castor batifolait sur le bord. J'avais bien vu un arbre abattu avec les traces de dent caractéristiques, mais je pensais qu'ils sortaient surtout la nuit. J'étais heureux comme un poisson dans l'eau. Il n'y a pas besoin de voiture ou de TV pour être heureux ! Que dis-tu ? On ne voit pas de castors tous les jours ! Bien sur ! Mais je t'affirme que j'étais déjà heureux avant. Le castor c'est juste la cerise sur le gâteau.

Revenons à nos canards. Ils ont été suivis par trois jeunes algériens. Non, pas dans l'eau, sur les marches d'un escalier. Ils fumaient tranquillement leur clope. Jeleur ai demandé s'ils aimaient le cigare. Ils m'ont répondu qu'ils n'en avaient jamais fumé. L'un voulait savoir si c'était bon. Je lui ai dit “Oui, un bon cigare, c'est bon. Mais pas celui-là.” J'avais choisi le premier prix et Mère Nature m'avait puni de ma pingrerie. C'était un véritable brule-gueule!

     Je peux gouter ?

     Bien sur!

     Oh, c'est fort !

Ils ont gouté tous les trois avec la même réflexion.

     Oh, c'est fort !

Le dernier m'a demandé si je le finissais.

     Non, tu veux le finir ?

     Oui.

Et il a tiré une taffe avec une volupté non dissimulée.

J'ai quitté le bord de Loire et je me suis enfoncé dans les petites ruelles et j'ai admiré leurs vielles façades étayées. J'ai envie de tout te raconter mais, pour aujourd'hui, je ne voudrais pas abuser de ta patience.

À demain alors... si Mère Nature le veux bien ! Oh, ça fait la troisième fois que je parle d'Elle. Pour un athée, c'est grave ! Faut que j'en parle à mon psy !

 Pierre Otchick.