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10/03/2014

La propriété privée, son histoire, sa justification

Fernand Comte1 nous a fait parvenir un véritable dossier sur la propriété privée. D'habitude je me contente de publier des extraits. Aujourd'hui, devant les réflexions que chaque ligne suscite, je ne me sens pas le droit de faire des choix. Je lui laisse la parole.

1. La propriété privée  n'est qu'une invention : "Nulle chose n'est en elle-même ma propriété, vu qu'une chose a une existence indépendante de moi ; seule ma puissance est à moi. Cet arbre n'est pas à moi ; ce qui est à moi, c'est mon pouvoir sur lui, l'usage que j'en fais. Et comment exprime-t-on ce pouvoir ? On dit : j'ai un droit sur cet arbre ; ou bien : il est ma légitime propriété. Or, si je l'ai acquis, c'est par la force. On oublie que la propriété ne dure qu'aussi longtemps que la puissance reste agissante ; ou, plus exactement, on oublie que la puissance n'est pas une entité, mais qu'elle n'a d'existence que comme puissance du Moi, et qu'elle n'existe qu'en Moi, le puissant." (Stirner)

2. La propriété privée, c'est l'exclusion de l'autre : la propriété implique un droit exclusif du propriétaire sur un bien, qu'il peut opposer à tous ceux qui ne sont pas propriétaire de ce bien. La propriété emprisonne donc les non-propriétaires d'un bien par rapport à celui-ci. Mais il y a plus. Comme on ne saurait être propriétaire de tous les biens, on est fatalement limités, exclus, emprisonnés par les exercices de propriétés dont nous ne sommes pas les titulaires.

C'est toute l'histoire des enclosures : Le mouvement des enclosures a commencé en Angleterre au XVIe siècle. Des champs ouverts et pâturages communs étaient cultivés par la communauté. Mais un jour les seigneurs ont installé des clôtures. Oh! Ils avaient de bonnes raisons : l'ordre, la rentabilité, peut-être même le respect de la nature, encore que cela est à voir. Toujours est-il que d'un seul coup, les paysans n'avaient plus d'espace pour leurs pâturages. Il s'en est suivi un très fort appauvrissement de la population rurale de l'époque.

On assiste d'ailleurs aujourd'hui à des manœuvres absolument semblables : ce sont, par exemple, les Indiens Kayapos, chassés de leur territoire pour la construction du barrage Bela Monte en Amazonie.

3. La propriété privée n'a souvent aucune justification. On a parlé longtemps de la preuve diabolique. La preuve diabolique ou «probatio diabolica» est avant tout un concept théorique apparu avec le droit romain et consolidé au Moyen-âge pour désigner une preuve que «seul le diable pourrait apporter», car pour l'homme cette preuve est tout simplement impossible à rapporter.

En effet, théoriquement pour prouver son droit de propriété, l'acquéreur d'un bien devrait en théorie démontrer qu'il tient ce bien de quelqu'un qui était lui-même propriétaire (car personne ne peut transmettre plus de droit qu'il n'en a lui-même), lequel le tenait de quelqu'un qui était lui-même propriétaire, lequel le tenait lui-même de quelqu'un qui était propriétaire, etc...

Au Moyen-âge, la "probatio diabolica" du droit de propriété était une expression utilisée par des juristes pour désigner la charge incombant au demandeur lors d'une action en revendication, lequel ne peut se limiter à démontrer la validité de son titre d'acquisition de la propriété sur la chose revendiquée, mais doit reconstituer tout le chemin effectué par le bien préalablement à l'acquisition, jusqu'à ce que la chaîne parvienne à la propriété originelle.

À suivre.

09/03/2014

Le zizi, la bandaison et l'entreprise II

Jeudi, quand j'ai recopié les idées d'Antoinette Fouque, j'ai été frappé par son allusion à la drogue. Elle associe son temps au temps industriel. Cela m'a rappelé un article de Stéphane Lauer dans Le Monde du 19 février (supplément Eco Entreprise p. 7). Tu peux remarquer en passant que c'est la troisième fois que je cite ce numéro du Monde1. Avoue que ça vaut le coup de payer 2€. Ce journal hyper bourgeois est quand même bourré d'idées. De ces idées qui font de ce début du XXIème siècle, les prémices d'un nouveau siècle des lumières.

Revenons à nos moutons. L'article parle d'un trader repenti qui a fait une confession dans une libre opinion du New-York Time. Ancien drogué aux vrais stupéfiants, il s'est sevré en spéculant. Avec des gains de plus en plus élevés (des doses de plus en plus fortes). Ce n'était pas le désir d'argent, mais le besoin de faire mieux que le collègue (mon zizi est plus gros que le tien !) . « Il s'agissait de pouvoir ! » dit-il. « [Il] découvre la hargne avec laquelle les traders défendent leur bonus [...]. Ils les compare à des héroïnomanes capables "de marcher pendant des kilomètres dans la neige, voler une grand-mère pour obtenir leur dose. Wall Street était comme ça. » Et ce sont ces individus qui dominent l'économie de notre planète !

Stéphane Lauer conclut en citant Robert Reich, professeur à l'université de Berkeley, dans un exercice de démolition des dogmes de nos néo-libéraux. Les riches sont créateurs d'emplois. Faux ! Réduire les impôts sur les bénéfices crée des emplois. Faux ! Le Saint-Esprit souffle sur nos éminences grises. Mais qui les écoute  ?

Pierre Otchick.

06/03/2014

Le zizi, la bandaison et l'entreprise I

«  le monde actuel vit sur le temps frénétique de la digestion (je mange, j'expulse et je recommence), et sur le temps industriel de la gestion. C'est le temps phallique qui gouverne l'entreprise, le temps de l'érection, le temps du flash, le temps de la drogue. Pour ma part, je ne suis ni sur le temps de la digestion ni sur celui de la gestion. Je suis sur celui de la gestation. Un temps long qui se déploie sur neuf mois, un lieu d'économie vivante, charnelle. Un temps du vivant plutôt qu'un temps de la technique, du calcul, de l'accumulation. Le temps de la création permanente, de l'échange et du partage.»

On ne peut mieux analyserla tare de notre monde néolibéral. C'est Antoinette Fouque, la grande figure féministe, qui parle. Elle nous a quitté l'année dernière et Télérama a sorti de ses tiroirs un interview percutant1. Comment expliquer mieux que l'entreprise vit dans une gigantesque régression phallique. Un retour à l'enfance : « Mon zizi est plus gros que le tien ». Toute une société baséesur un comportement infantile ! L'intérêt général est complètement oublié dans ce vaste concours de bites.

Et Antoinette Fouque nous ouvre la voie : une culture qui permette au terrien de passer au stade génital. Si l'homme génitalisé maîtrise sa partenaire, c'est pour mieux la faire jouir et la féconder. Plus question de compétitivité. Avec son "antropoarchie" le citoyen de Dzêta-1-4 du Réticule maîtrise la concurrence mais c'est dans l'intérêt de tous. Plus question de croissance (d'érection) mais d' « échange et de partage ». C'est pas beau ça ?

Utopie ? Oui. Mais nous n'avons pas le choix. Notre civilisation va au casse-gueule. René Dumont disait «  C'est l'utopie ou la mort ! ». Il faut une révolution dans les mentalités autant que dans les structures. Une société basée sur le jouir et faire jouir.

1 Télérama de la semaine prochaine (n° 3347)